Haïti au Grand Palais

Publié le : 19 août 20204 mins de lecture

Haïti : terre d’effervescence artistique

Tiens, c’est au Grand Palais que l’art haïtien a pris ses quartiers en plein automne parisien. En cette matinée glaciale de novembre, il n’y a pas foule pour découvrir les deux siècles de foisonnement artistique d’une île marquée par les soubresauts de son histoire. D’ailleurs, à quoi ressemble l’art contemporain haïtien ? 

Accueilli par une énorme sculpture lumineuse de l’artiste Edouard Duval Carrié, en forme de portique, le ton est donné dès l’extérieur : place aux couleurs et à l’émotion. A l’intérieur, au sein d’une seule et grande même pièce, entre peintures, sculptures, dessins, installations, sculptures et quelques vidéos, les œuvres s’enchaînent, s’imbriquent et dialoguent organisés autour de quatre sections :« Sans titres »« Esprits »« Paysages » et « Chefs ». L’idée ? Laisser évoluer le visiteur autour de cette pluralité d’expressions quitte à lui donner le tournis dans un espace quelque peu restreint pour accueillir deux cents ans d’histoire. Mais bon, passons. Car pour cette trop rare occasion, les œuvres de plus d’une soixantaine d’artistes d’origine haïtienne ont été réunis par la commissaire Regine Cuzin, dans une volonté assumée de briser les stéréotypes longtemps affublés aux manifestations artistiques de l’île d’Haïti : un art naïf, primaire, tribal… Bref, rien de bien sérieux face au sacro-saint art « occidental ».

« Entre pays rêvé et pays réel »

Et pourtant. Les œuvres présentées ici brillent de mille feux, jamais considérées comme des finalités par leurs créateurs mais comme le support d’un questionnement identitaire perpétuel. Oscillant entre un imaginaire flamboyant, un violent réalisme et une spiritualité omniprésente, l’art haïtien interpelle. Du « Hibou » de Robert Saint-Brice, figure de l’art naïf qui se confronte au « Loas » de Sébastien Jean, plasticien contemporain, du travail d’orfèvre de David Boyer dont les boutons sont savamment disposés pour former un tableau à la fois minutieux et lumineux avec ces têtes de morts anonymes customisées de strass, de paillettes et de coquillages, il se dégage l’énergie d’une diaspora bouillonnante de créativité. Plus complexes que la simple vision magico-religieuse qui a longtemps prévalu, plus ambitieuses que les produits de l’art naïf, les œuvres de l’exposition rendent compte de l’importante vitalité artistique de la première république noire. Un art qui oscille certes entre pays réel et pays rêvé mais qui est parvenu à développer une véritable identitéesthétique dont cette exposition est finalement un bel aperçu.

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